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Vendredi 5 février
Départ d'Orchha
à 9H pour attaquer un trajet de 4 heures et parcourir à peine 180
kilomètres. Il faut dire que pas mal de sections du réseau routier de cette
région sont étroites et mal revêtues.
Au départ, nous passons le pont routier parallèle au pont ferroviaire sur la
Betwâ. Plus tard, après Mau Ranipur, nous franchirons la rivière Dhasan,
affluent de la Betwâ. Puis ce sera Chhatarpur et nous quitterons la route 75 (ou
NH39) à Bamitha pour les 8 derniers kilomètres sur une route confortable
nous conduisant à Khajurâho.
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Sur ce trajet, spectacle de petit collège rural, de villageois coupant des arbres d'alignement, de paysage très aride et rocheux par endroit nous rappelant le plateau du Dekkan et le Tamil Nadu intérieur, point d'eau à côté d'un cloaque fangeux, laitier transportant une demi douzaine de gros bidons accrochés au porte-bagage de sa moto, pont en construction, crématoire villageois, convoi exceptionnel transportant une grue, dépôts d'ordures plastiques, petits mausolées de pierre ou blanchis à la chaux, bouses mises à sécher, puits-citerne, gracieuses lycéennes à vélo et jeunes écoliers en uniforme, ferme avec des grains (riz? lentilles?) mis à sécher dans la cour. Non loin de Chhatarpur, on peut voir un ancien édifice évoquant un petit palais ou plus probablement un imposant mausolée orné de chhatris aux angles ainsi qu'autour du dôme central. Bien sûr, on n'évitera pas les salons de mariage ou une publicité électorale pour le parti du Congrès qui semble tout ignorer de la notion de parité de genre...
Près du but, nous traversons
Bamitha, petite bourgade avec ses artisanats utilitaires puis une maison kitsch
en rose saumon, avant d'arriver à Khajurâho. Il est difficile de connaître la
population de Khajurâho qui est qualifié de "village", les valeurs que l'on
peut trouver vont de 10 000 à 25 000 habitants (en passant par les
intermédiaires 15 000 et 20 000 !)...
L'hôtel Ramada **** où nous déjeunons se situe après l'aéroport de
Khajurâho et la petite rivière Khudar, à 2 ou 3 kilomètres du village et
des sites des fameux temples de Khajurâho. Hôtel, apparemment prisé pour
l'organisation de grands mariages à en juger par les décors mis en place. Ici le
wifi est payant (400INR par jour!) mais heureusement les chambres sont
confortables. Notre chambre en rez-de-chaussée donne sur un parc avec même un
petit jardin potager situé à l'arrière. Une piscine est également disponible et
l'on peut commander des massages. L'hôtel malgré son aspect moderne est très
bruyant par rapport à la circulation dans les couloirs et mal insonorisé entre
chambres et entre étages. De plus, les chasse-d'eau sont particulièrement
bruyantes et inefficaces..
Le groupe Marriott International a cédé les hôtels Ramada à son
concurrent américain Cendant Corporation en 2004 qui les gèrent sous
l'entité Wyndham Worldwide.
Déjeuner servi à table et l'on réussi avec le concours de
Mahipal
à se faire préparer du poulet cuisiné spécialement genre blanquette, sans aucune
épice. Par contre, à 107INR, la bouteille d'eau (traitée et non de
source) a fait la culbute par rapport à Delhi.
«Œuvre de la dynastie des
Chandella, qui connut son apogée entre 950 et 1050, les temples de Khajurâho
dont il ne subsiste plus qu'une vingtaine se répartissent en trois groupes
distincts. Ils appartiennent à deux religions différentes, l'hindouisme et le
jaïnisme et réalisent une synthèse exemplaire entre l'architecture et la
sculpture. C'est ainsi que le temple de Kandariya est décoré d'une profusion de
sculptures qui comptent parmi les plus grands chefs-d'œuvre de la plastique
indienne.»
(cf.
http://whc.unesco.org/fr/list/240).
Selon la légende, Khajurâho aurait été fondé par Chardravarman, fils du dieu de
la lune (Chandra) qui aurait jeté son dévolu sur une jolie vierge se
baignant dans une rivière.
Les temples de Khajurâho qui subsistent ont été construits par les souverains
de la dynastie Chandella entre le Xe et le XIIe siècles, Khajurâho
étant la capitale religieuse de cette dynastie. Ces temples étaient consacrés
aux cultes hindouistes et jaïns.
Des 85 temples édifiés de 900 à 1050, il n’en reste plus qu’une vingtaine
(25). L’éloignement de Khajurâho a permis aux temples d’être sauvés des
destructions musulmanes. Abandonnés par les dynasties, la jungle reprit ses
droits. C’est en 1838 que l'officier britannique Burt les redécouvrit. Ils
sont classés au Patrimoine mondial de l'UNESCO
depuis 1986.
Le temple actif de Matangeshvara:
A l'extérieur de la zone archéologique protégée, se dresse le temple actif de
Matangeshvara utilisé par les fidèles.
Le groupe ouest est le plus connu pour ses sculptures
érotique
Le frère de
notre guide local, un brahmane, y officie.
Matin et soir, la cérémonie de l'Aarti s'y déroule.
C'est un rituel hindou au cours duquel la lumière de mèches imbibées de ghī
(beurre clarifié) ou de camphre est offerte aux déités.
Un site internet
à consulter:
http://flanerieenasie2.blogs-de-voyage.fr/2014/03/05/khajuraho-et-ses-temples-cultes-du-groupe-ouest/
La visite débute avec le
vaste ensemble des temples de l'ouest particulièrement connu pour leurs
sculptures érotiques bien que celle-ci ne constitueraient que 10% des sculptures
(certains, plus modestes, parlent de 5%). Bien sûr, mine de rienm les guides ne
manquent pas de signaler les plus croustillantes aux visiteurs qu'ils savent
intéressés par la chose. Après, le jeu consiste à en dénicher d'autres par soi-même
et il y en a...
Ce genre de sujet se retrouve dans de grands reliefs (les
sujets représentés sont nettement détachés du support) de près d'un mètre de
haut ainsi que sur de longues frises plus petites courant sur plusieurs
niveaux séparant les registres principaux.
Les sculptures illustrent tous les aspects de la vie y compris le sexe.
Celui-ci revêtait une grande importance dans la mesure où le cosmos tantrique
est divisé en principe masculin (potentiel) et principe féminin (énergie) qui ne
peuvent aller l'un sans l’autre.
Ici, contrairement à d'autres temples, du sud notamment, pas des gopis,
de naïves bergères jouant de la flûte, mais surtout des apsaras, les
danseuses célestes. Bien sûr les Dieux sont présents sur les fresques évoquant
les grandes épopées qui constituent le fondement culturel indien, le Mahâbharata
et le Râmâyana. D'autres tableaux immortalisent les exploits de rois bâtisseurs
et conquérants. Enfin, tout un ensemble d'images mettent en scène la vie
quotidienne en partie fantasmée en ce qui concerne les scènes érotiques...
Les murs extérieurs sont pourvus de frises et de médaillons sculptés
répondant à une hiérarchie. Les parties basses du temple représentent le
niveau humain, les parties hautes, le niveau divin.
- Les frises des parties basses du temple présentent des scènes de la vie
ordinaire, quelquefois des scènes triviales. Ainsi, les actes sexuels ont-ils
une prédilection pour les postures considérées comme "bestiales", par exemple
l'homme debout pénétrant par l'arrière la femme penchée en avant, voire
complètement animales avec l'acte sexuel entre un être humain et un animal... On
est tenté de voir dans ces représentations l'aspect le plus "bas" de l'activité
sexuelle humaine.
- Les accouplements souvent acrobatiques pour lesquels les touristes
manifestent beaucoup d'intérêt sont le fait de Yogi experts dans la pratique du
du Tantrisme. Ces postures "risquées" de Kama Sutra ne sont pas faites pour le
commun des mortels. Ces "exploits" mettent souvent en jeu plusieurs
partenaires et des assistantes qui trouvent manuellement leur satisfaction.
Contrairement au commun de mortels, pour ces adeptes le tantrisme est une voie
de libération des conditionnements de l'être humain, pour autant qu'elle soit
guidée par un enseignant qualifié (guru) et par des motifs non attachés à
la jouissance physique. Les postures spéciales adoptées exigent des compétences
physiques hors du commun dont les objectifs dépassent largement la sexualité
"normale".
- Sur les registres architecturaux où résident les êtres célestes, les nymphes
gracieuses aux formes voluptueuses et aux courbes sensuelles ont tout pour
inspirer des désirs puissants. Leurs activités (se regarder dans un miroir, se
coiffer, se maquiller les sourcils, se retirer une épine du pied, faire ou défaire
un vêtement de mousseline transparente) n'ont d'autre but que la séduction.
Parfois elles ouvrent leur léger vêtement au niveau des cuisses, dévoilant leur
sexe. Elles sont représentées accompagnées d'une petite servante ou d'un petit
singe à leurs pieds. Cet animal symbolise la passion amoureuse aveugle. D'autres
ont un scorpion tatoué sur la cuisse, un animal qui évoque la passion sexuelle.
Les dieux qu'elles accompagnent et entraînent dans des jeux amoureux sont des
êtres parés de tous les attributs de la beauté et de la séduction. On représente
ces couples dans des postures sensuelles (par exemple le dieu enlace sa
compagne, nymphe ou shakti, sa main tenant gentiment son sein, et ils se
regardent amoureusement) mais pas s'accouplant.
La représentation des divinités se trouve au niveau de la partie
sacrée du temple, sous la tour curviligne (shikhara), laquelle surmonte
l'espace sacré de la cella. Ici les divinités se trouvent sur trois
registres superposés, à plusieurs mètres au-dessus du niveau du sol.
Lorsqu'ils ne sont pas complètement nus, les personnages ne sont parfois
"habillés" que de parures: collier en sautoir passant sur les mamelons,
"ceinture-string" faisant office de cache-sexe. Les nymphes que l'on voit ici
n'ont rien à envier pour la beauté plastique aux Vénus antiques et aux Eve de la
Renaissance européenne. Elles sont gracieuses et vivantes par leur
déhanché, par des attitudes naturelles... Une particularité du
canon de la beauté féminine réside ici dans la bien peu réaliste forme
parfaitement en demi-pamplemousse des seins de ces dames...
Autre remarque, le caractère parfois cru de certaines scènes est accentué en
raison de l'angle sous lequel elles se présentent. Même en prenant du recul, les
tableaux placés en hauteur sont vus en contreplongée, autrement dit en plaçant
au premier plan les organes génitaux...
K
hajurâho
amasutra
"Kamasutra,
le traité le plus ancien du monde sur le sexe et la passion" de Tarun
CHOPRA |
Le temple de Varâha:
Le temple de Lakshmana:
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Bien qu'étant un des plus
anciens sur le site de Khajurâho, il est aussi
l'un des plus finement décorés, quasiment recouvert par des représentations
de 600 dieux du panthéon indien.
L'extérieur percé de fenêtres à balcon aux balustrades ornées comporte deux
rangées de grandes sculptures représentant des divinités, des animaux réels
et mythiques, des couples et des scènes érotiques. Comme sur les autres temples
on appréciera le côté vivant des scènes avec le déhanchement de personnages vus
de face ou de profil et par leur gestuelle. Par exemple, la femme qui semble
enlever une épine de son talon, assistée d'une petite servante.
Les scènes érotiques, très explicites, sont situées sur le côté sud du
bâtiment mais ne constituent en réalité qu'une portion infime de la décoration.
L'une des plus remarquées est celle de l'homme en chandelle (reposant sur la
tête) et pénétrant une femme qui enserre son bassin soutenue par des assistantes
que l'homme caresse de ses mains libres.
Les murs de soubassement dévoilent des scènes de couples s’unissant dans des
positions acrobatiques ou de scènes de zoophilie (un homme s’accouplant avec une
jument tandis qu'une femme témoin de la scène se cache le visage). Ou encore, un
éléphant qui détourne la tête pour voir la scène et semble sourire ou
encore un autre éléphant qui regarde un homme doté d'une érection
phénoménale...
La porte du sanctuaire tournée vers l'est est constituée de sept shakhas
(panneaux verticaux), celui situé au centre est décoré de plusieurs incarnations
de Vishnu. Le linteau représente la déesse Lakshmi flanquée de Brahma et Vishnu.
A l'intérieur, le sanctuaire contient une sculpture de Vaikuntha Vishnu à trois
têtes (tête centrale humaine et, latéralement, de deux autres: de sanglier,
représentant Varaha, et de lion, représentant Narasimha) et à quatre bras
provenant du Tibet.
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Ce temple tire son nom de
Kandara ("grotte") et Mahadeva ("grand dieu"), un autre nom de Shiva dans sa
forme d'ascète, est situé immédiatement à l'ouest du temple de Lakshmana. Il a
été construit par le roi Vidyadhara vers les années 1025-1050, bien que
des légendes locales le fassent remonter à 1000 ans avant J.-C.
C'est le plus grand temple et le plus décoré avec 872 statues. Comme le
précédent, il est orienté à l'est. La tour de 30 mètres de haut qui le surmonte
est impressionnante.
L'extérieur du temple est décoré de 646 statues mesurant près
d'un mètre de haut réparties sur 3 registres avec un grand nombre
de scènes érotiques dont certaines très osées et d'autres très acrobatiques.
L'intérieur très dépouillé, comme c'est d'usage, contraste fortement avec
l'extérieur foisonnant de sculptures mais compte néanmoins 226 statues dont un
lingam en marbre représentant Shiva.
Le temple de Devi Jagadamba:
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Le temple de Devî Jagadambâ partage la plate-forme du Kandarîya Mahadeva. Il
s'agit de l'un des plus finement décorés, avec en particulier de
nombreuses scènes érotiques. Bien que comportant une grande représentation
de la déesse Devî, il était probablement consacré autrefois à Vishnu. Il fut
construit au début du XIe siècle, à l'apogée de la dynastie des Chandella.
Trois grandes frises de sculptures courent sur les façades du temple. On
y voit des sardula, aninaux mythiques, moitié animal, moitié humains, des
femmes qui servent les dieux et déesses en portant des miroirs, des fleurs et
encore des mithuna, ces fameuses sculptures de couples enlacés dans des
poses sensuelles. Dans le sanctuaire on peut voir une grande sculpture de
la déesse Devi.
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Ce temple a été construit en 1002 (ou 999) sous le règne de Dhanga. Des nymphes sensuelles écrivent, jouent de la musique, bercent des nourrissons et toujours des scènes érotiques, entre yoga et tantrisme.
Le modeste temple dédié au taureau Nandi, la monture de Shiva, est situé en face du Temple Vishvanath. Il est surmonté d'une frise érotique. Le Nandi est représenté couché comme c'est la tradition et il mesure 1,80 mètre de haut.
CEUX QUI DISPOSERAIENT DE PLUS DE TEMPS, POURRAIENT ALLER VISITER
A KHAJURAHO, au sud du village, voir les temples de Brahma et surtout ceux de Vamana (Xe s.) et de Duladeo.
Au cours du règne des Chandela, de nombreuses villes du Bundelkhand, y compris
Khajurâho, accueillaient de grandes et florissantes communautés jains. Quelques
temples jaïns de cette période ont survécu dans cette partie située à l'est de
Khajurâho et sont aujourd'hui situés derrière un mur d'enceinte construit au
début du XIIème siècle, à l'exception du temple Ghantai.
Deux des anciens grands temples sont bien conservés.
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Temple d'Adinath:
A côté du temple précédent se trouve celui dédié à Adinath (ou Rishabhadeva),
"le Premier Maître" du jaïnisme, le premier éveillé, le premier des 24
Tirthankara (selon la tradition jaïne, il vécut au IXe siècle av. J.-C.). Le
temple est plus petit mais comporte de beaux piliers. Pour les Jains, ici le
taureau est l'attribut d'Adinath comme il est celui de Shiva pour les hindous.
Une inscription permet de le dater de 1215, pendant le règne roi
Madanavarman, de la dynastie de Chandella.
Temple de Shantinath:
Le temple Shantinath est un ensemble composite moderne qui incorpore des
sections de plusieurs temples et de plusieurs sanctuaires antérieurs. On
peut y voir des représentations de divers Tirthankara dont celle de
Shantinath, le seizième maître éveillé du jainisme, avec une inscription
de 1085.
En retournant à l'hôtel, un peu avant 19H, petit arrêt au centre du village dans
un atelier de sculpteurs qui reproduisent des statues en grès destinés
aux amateurs qui souhaitent en orner leur jardin, même sous d'autres cieux.
Soirée animée avec un mariage organisé dans une aile de l'hôtel et banquet
dans le jardin attenant. A défaut de musique digne de ce nom, beaucoup de
bruit délivré par une sono rustique (comme nous en avions vu et entendu en
Birmanie) consistant en une remorque équipée de 8 ou 10 haut-parleurs nous
inondent d'une musique nasillarde.
Avec notre programme mal défini, nous nous retrouvons avec une matinée oisive. Après un tour dans les jardins de l'hôtel où des installations sont en cours de démontage suite à des festivités de mariage, nous faisons un petit tour le long de la large rue conduisant au village et y rencontrons le jeune Reetesh avec lequel nous discutons et découvrons sa jeune activité dans le tourisme.
Le parc national de Panna abrite la plus célèbre réserve de tigres d'Inde.
A 13H, après le déjeuner pris à l'hôtel, une jeep Mahindra nous embarque avec
Mahipal pour un
mini-safari. Le parc est distant d'une trentaine de kilomètres, après être
repassés par Bamitha, sur l'axe principal, nous traversons des hameaux
poussiéreux en raison de travaux d'aménagement routier. Nous faisons une étape
d'une bonne demi-heure dans le camp des gardes et pisteurs puis une pause au
café voisin de l'entrée du parc. En effet on n'y accède qu'à partir de 15H.
Au chauffeur s'est joint un pisteur.
Aurons-nous la chance d'apercevoir des animaux notamment le tigre du Bengale
(Panthera tigris tigris)
qui est l'emblème du parc ? Actuellement, dans le monde
ne survivraient qu'à peine 3900 spécimens de cette magnifique espèce animale
alors qu'on en estimait la population à 100 000 il y a un siècle...
Sur les 53 tigres adultes recensés dans ce parc, actuellement il en est
parfois aperçu un de temps en temps lors des safaris. Il paraît que la saison
des pluies s'y prête mieux mais les arbres qui ont alors repris leur feuillage
et les herbes qui ont reverdi font obstacle à une bonne observation. Le tigre
est le plus grand félin sauvage et l'un des plus grands carnivores terrestre.
C'est un superprédateur dont les canines peuvent mesurer 9 centimètres qui
chasse principalement les cerfs et les sangliers
A 15H, les portes du parc s'étant ouvertes et notre véhicule est le premier à y pénétrer. Nous pénétrons dans un paysage de savane et de forêt dépouillée. En cette saison les tecks ont perdu leurs feuilles. On peut voir également des arbustes tendu ou kendu (Diopyros de la même famille que les kakis et plaqueminiers) dont les feuilles servent pour envelopper le tabac des célèbres bidî, les fines cigarettes indiennes. On nous montre aussi le palmier à bétel (Areca catechu) dont le fruit, la noix d'arec, entre dans la composition des tout aussi célèbres chiques de bétel. Plus loin, autre curieux arbre à l'aspect de cactus...
LA CHIQUE DE BETEL
C'est une sorte de chewing-gum naturel dont les hommes font largement usage en Asie. C'est une substance à mâcher destinée à exciter la sécrétion salivaire et à donner du tonus. Elle est composée d'une feuille d'une plante grimpante de la famille des poivriers, le bétel (Piper betle), au goût poivré, d'une noix d'arec (Areca catechu) au goût sucré auquel on ajoute des épices variées comme de la muscade, du girofle, de la cardamome et du tabac ainsi que de la chaux parfois obtenue à partir de coquillages ou de corail carbonisés.
L'âcreté qui se dégage à la mastication provoque une sensation de bien-être, d'euphorie légère, de meilleure concentration, de sudation, d'augmentation de ses capacités physiques. Le bétel induit divers effets physiques tels que vasodilatation ou vasoconstriction, accélération du battement du coeur, hypo ou hypertension artérielle, augmentation du tonus, hyper salivation (de couleur rouge sang), contraction de la pupille... Un mâcheur de noix de bétel se repère facilement par une bouche rouge, des dents noires, une haleine forte et des crachats intermittents de couleur rouge sang.
La chique de bétel est l'une des quatre ou cinq principales drogues psycho-actives au niveau mondial, avec le pavot (Papaver somniferum var. album), le kat ou cath (Catha edulis), la coca (Erythroxylon coca) et le cannabis (Cannabis sativa). En outre, le risque d'apparition de cancers est multiplié par 20 chez les chiqueurs en raison du mélange des deux cancérigènes que sont la noix d'arec et le tabac. En effet, la noix d'arec utilisée dans ces chiques provoque des cancers buccaux et œsophagiens par les nitrosamines carcinogènes formées lors de la mastication alors que les feuilles de bétel possèdent un pouvoir protecteur. Notons toutefois que la noix d'arec est utilisée depuis l'antiquité par la médecine chinoise comme médicament pour soigner les migraines, les rhumatismes ou pour abaisser la fièvre ou encore pour éliminer les parasites intestinaux.
Au bout d'une dizaine de minutes, nous rencontrons nos premiers singes langurs gris ou langurs sacrés (Semnopithecus entellus dussumieri) connus aussi sous le nom de semnopithèques ou entelles des Indes puisque leur habitat se trouve au centre de l'Inde. Le corps des adultes peut atteindre 70 cm de long avec une queue de 100 cm. Un petit au pelage doré encore craintif s'accroche à sa mère tandis que les adultes restent tranquillement au bord de la piste.
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Puis peu après, grâce aux sens aiguisés de l'observation
du pisteur et du chauffeur, nous apercevons de grandes (jusqu'à 1,50 mètre
au garrot) antilopes nilgaut (Boselaphus tragocamelus) de la
famille des bovidés, antilopes surnommées "vaches bleues" en raison du
pelage gris ou gris-bleu du mâle alors que celui de la femelle est roux. C'est
un animal typique des savanes et steppes herbeuses ainsi que des forêts claires
de la péninsule indienne. Les pattes antérieures sont plus longues que les
postérieures. Le mâle possède une touffe de poils au niveau de la gorge et
porte de courtes cornes. Ils ont des sens aiguisés pour fuir les prédateurs
comme le tigre.
Peu après, c'est la rencontre avec deux espèces d'antilopes. Les
sambars (Cervus unicolor ou Rusa unicolor) sont de grands
mammifères herbivores de la famille des cervidés (sous-famille de bovidés)
vivant en Asie du sud. Nous apercevrons principalement de nombreuses femelles de
couleur fauve, un jeune mâle (daguet) aux bois naissants, un grand mâle et un
peu plus loin, une biche avec son faon buvant dans un point d'eau. A noter
que les faons de cette espèce ont la particularité d'avoir un pelage de couleur
uniforme, sans taches blanches.
Egalement, les antilopes chitals sont nombreuses par ici: mâles,
biches et faons. Les chitals ou cerfs axis (Axis axis) sont des
cervidés répandus dans l'ensemble du sous-continent indien. Leur nom vient de
l'hindi cītal, issu du sanskrit citrala voulant dire "avec des
taches". En effet, leur joli pelage fauve-roux parsemé de rangées de petites
taches blanches sur le dos et les flancs fait que cet animal a été largement
introduit dans diverses régions du monde. Pour échapper au tigre, les chitals
coopèrent avec les langurs. Ces derniers profitent de leur bonne vue et font
aussi tomber des fruits dont profitent les chitals qui de leur côté se servent
de leur odorat pour détecter le danger. Nous verrons des groupes importants de
femelles accompagnées de quelques mâles. Ces animaux sont 5 fois plus légers que
les sambars (la hauteur au garrot est inférieure à 1 mètre pour les mâles).
Petits mais rapides (40 km/h en endurance et 95 km/h en pointe) et agiles (bonds
de 2 mètres).
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Arrêt au-dessus d'un étang au bord duquel on peut apercevoir des tortues
étoilées d'Inde (Geochelone elegans) ainsi qu'un joli martin-pêcheur perché
près du rivage. On peut également voir de curieuses roches d'origine volcanique,
des brèches ou poudingues, comportant des incrustations d'autres fragments de
roches noires, blanches ou rouges (rhyolite? porphyre?).
Nous reprenons notre quête du tigre. Ce sont à nouveau des antilopes
sambars et chitals et des singes langurs. Et de la couleur avec un animal
emblème de l'Inde,
le paon bleu (Pavo cristatus) en quête de nourriture sur le sol et
donc proies possibles pour les tigres et les léopards car son envol vers
les arbres est souvent problématique.
Bientôt nous arrivons sur le rivage de la rivière Ken, affluent de la
Yamuna. Assez loin, il faut utiliser zoom et jumelles, on aperçoit sur un rocher
un crocodile ou plus exactement un gavial du Gange (Gavialis gangeticus).
Il est impressionnant par sa taille (6 mètres soit autant que le crocodile du
Nil) et remarquable par sa gueule effilée mais redoutable seulement pour les
poissons et autres animaux aquatiques qui forment son ordinaire. Cependant il
pourrait mordre si on venait le déranger mais il a aussi le handicap de se
déplacer difficilement hors de l'eau. Cet animal est le "véhicule" de la déesse
Ganga (le Gange).
A propos du projet pharaonique "Interlinking Rivers"
L'agence nationale de l'eau est chargée depuis 1982 du projet d'Interconnexion de 37 rivières et fleuves du pays à l'aide de barrages et de canaux de dérivation afin de favoriser l'irrigation (avec l'objectif de faire passer les surfaces irriguées de 140 à 175 millions d'hectares d'ici 2050 et, dans ce même intervalle, de porter la production céréalière de 265 à 450 millions de tonnes) et la production hydroélectrique. Un projet qui engloutirait plus de 1,5 million d'hectares, provoquerait le déplacement de près de 3 millions de personnes et coûterait 144 milliards d'Euros.
Ce projet fut mis en sommeil pendant une dizaine d'années jusqu'à ce que le Premier Ministre Narendra Modi le réactive en 2014.C'est ici, sur la rivière Ken que sont engagés actuellement les premiers travaux de ce grand projet national avec la construction d'un barrage en vue de connecter les rivières Ken et Betwâ. Mais ce projet pharaonique n'intervient qu'à la marge car l'irrigation se pratique essentiellement à partir des nappes phréatiques et il convient de protéger leur processus naturel de recharge, d'éviter la salinisation des cours d'eau et la perturbation du cycle des moussons qui résulterait d'un moindre apport d'eau chaude fluviale dans le golfe du Bengale favorable à la formation de dépressions.
Toujours des animaux mais pas de tigre. D'autres véhicules parcourent les
pistes et les pisteurs communiquent entre eux. Près de la rivière d'où nous
venons, un tigre aurait été aperçu.
Il faut s'accroche car notre chauffeur lance la jeep à toute allure sur les
pistes puis sur le rivage rocheux. Une bonne douzaine de véhicules sont là mais
point de tigre. Y en a-t-il vraiment eu un ? Est-il reparti? Et il est déjà
17H15!
Nous repartons sans grand espoir. A tort car pas plus de cinq minutes se
sont écoulées que notre pisteur signale des tigres dans les broussailles
sur notre gauche. On s'éloigne avec l'espoir de les voir couper la piste plus
loin, dans un vallon où l'on s'arrête. Bientôt on entend les singes crier.
C'est bon signe. Les autres véhicules, une dizaine, se sont également
arrêtés sur l'autre versant. Bientôt on voit apparaître la fourrure rousse
rayée de noir d'une majestueuse et nonchalante tigresse connue des pisteurs
suivie par ses deux jeunes, un mâle et une femelle nous dit-on, âgés
d'environ 17 mois. Ils quitteront leur mère et son territoire à l'automne
prochain, à moins qu'ils soient expédiés vers un autre parc. Leurs rayures qui
servent au camouflage sont différentes d'un individu à l'autre et même d'un
flanc à l'autre et constituent une véritable "carte d'identité". Nonchalants
certes mais avec de belles foulées et il peut courir sur de faibles distances à
la vitesse de 50 km/h. Les mâles peuvent peser de 100 à 300 kilos pour une
hauteur au garrot proche du mètre.
Nous aurons le loisir de les observer pendant 7 ou 8 minutes, approchant
de la piste, la traversant puis s'enfonçant dans les hautes herbes de l'autre
côté. Face à ces superbes gros chats qui passaient nonchalamment à moins
de 10 mètres de la jeep, on aurait presque envie de descendre pour aller les
caresser.
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Nous n'avons pas rencontré de lynx ou de sangliers par ici, pourtant assez communs. Ni
de léopard indien (Panthera pardus fusca) pourtant le parc en
accueille une soixantaine dont la moitié ont leur habitat dans la zone ouverte
aux visites. Il cohabite donc avec le tigre. Plus petit (environ 60 cm au
garrot) et léger (une cinquantaine de kilos pour les mâles) que le grand félin
mais bon sauteur, il jette son dévolu sur les chitals.
A 18H, nous sortons du parc après avoir à nouveau croisé toutes sortes d'animaux
et une demi-heure de route pour revenir à l'hôtel.
Nous devions par la même occasion
nous rendre aux cascades de Pandav (ou Pandava) sur la route entre
Panna et Khaujrahi Nahri mais ce n'est pas possible actuellement en
raison de travaux routiers. De hauteur modeste (30 mètres), les eaux d'un
affluent de la rivière Ken la rejoignent ici. Selon la tradition, les cinq
frères Pandavas, les demi-dieux héros de l'épopée mythologique Mahabharata,
avaient résidé dans les grottes situées près des chutes et ils auraient
visité la région au cours de leur période d'exil de 13 années pendant leur
combat contre les Kaurava, combat qu'ils finiront par gagner.
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Après notre dîner, vers 20H30 nous nous joignons un moment au début des
festivités d'une soirée animée de banquet d'un grand mariage. Ambiance
musicale et décors super kitsch et très bollywoodiens. Le marié arrive dans un
carrosse rutilant de petites lumières multicolore tandis que la mariée en robe
rouge est entourée de ses amies. Comme la veille, une remorque sono portant de 8
ou 10 haut-parleurs qui nous inondent d'une musique nasillarde sur laquelle les
invités se mettent à danser et invitent les pensionnaires de l'hôtel venus là en
curieux tandis que le marié (corpulent) est porté en triomphe sur les épaules de
ses amis.
Vers 21H30, les Indiens se rendent au banquet installé dans l'un des
jardins de l'hôtel. Nous n'avons qu'à espérer que ceux des invités qui logent à
l'hôtel ne seront pas trop bruyants après leurs agapes... Par la télé, nous
apprenons que des grèves ont lieu à Delhi pour obtenir des augmentations de
salaires...
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Tantra est un terme appliqué à
un système métaphysique pratique originaire de la région himalayo-indienne. Dans
ce système on considère comme base de l'univers deux principes symbolisés par le
couple masculin et féminin. Le tantra traditionnel est une « voie de
transformation intégrale de l'être humain », qui passe par le corps et les cinq
sens.
il convient de distinguer la nudité
rituelle, ou celle déterminée par des pratiques magiques, de la nudité profane.
Par exemple pour les moines adeptes de l’hindouisme ou du jaïnisme la nudité
n’est pas seulement un élément d’une grande ascèse, mais aussi le symbole d’une
spiritualisation extrême.
Aussi ne faut-il pas s'étonner de voir ce corps humain magnifié
et exalté dans la sculpture et la peinture, en Inde. Il ne faudrait d'autre part
pas s'étonner du caractère parfois quelque peu choquant, pour un oeil
occidental, de l'esthétique religieuse hindoue. A cause du climat tropical et
semi-tropical, la nudité et la semi-nudité étaient courantes dans l'Inde
ancienne, et l'artiste s'inspirait le plus souvent de ce qu'il percevait
lui-même. De plus, même dans l'explosion sensuelle, qui fleurit dans toute
l'iconographie, il faut retenir que la notion occidentale, ou judéo-chrétienne,
de péché est totalement inconnue : la conception indienne et hindoue n'est pas
tributaire d'une conception d'un péché originel, marquée par une interprétation
sexuelle. Au contraire, une grande partie de la vie religieuse repose sur le
principe même de la fécondité. L'union sexuelle apparaît même parfois comme le
support même de l'Esprit masculin et de la Nature féminine, dans une perspective
créatrice.
Le tantrisme propose deux voies différentes pour expliciter le
chemin qui est susceptible de conduire l'homme jusqu'à la délivrance, par un
système de vie bien particulier. La première voie se concentre sur l'énergie
cosmique, qui se trouve incorporé à l'individu sous la forme d'un serpent lové
au bas de la colonne vertébrale, dans un cercle : c'est cette énergie qu'il
convient de faire monter progressivement, à travers les différentes parties du
corps, jusqu'au sommet du crâne, lieu du siège de Çiva. Cette première voie,
dite voie de droite, dakshinâcâra, repose donc sur la conception de différents
centres énergétiques, à l'intérieur du corps humain, six centres qui sont
couronnés par le septième, au sommet du crâne, tandis que le centre inférieur
est le siège de la Déesse, laquelle, sous la forme du serpent, symbolise toute
l'énergie cosmique. Toute la méthode tantrique, pour cette première voie
consiste donc à faire monter l'énergie, de sa forme la plus inconsciente à sa
forme la plus élevée, où elle pourra permettre l'identification de l'âme humaine
avec Être absolu, le Brahma universel. Cette voie de droite peut être considérée
comme une sublimation de l'acte sexuel, tandis que la seconde voie manifeste
beaucoup plus des tendances érotiques, cette voie étant alors appelée voie de
gauche, vâmâcâra. Le principe même de cette voie réside dans l'affirmation qu'on
ne peut se libérer de ses passions qu'en les assouvissant, donc en donnant libre
cours à toutes ses sensations, à tous ses sentiments. Ainsi, certaines sectes
tantriques n'hésitent pas à développer des pratiques sexuelles dans le cadre de
leur liturgie, avec des mises en scènes individuelles ou collectives de
réalisation sexuelle. Le but de cette stimulation érotique se présente comme une
cure d'homéopathie : pour éprouver la vanité de toutes les jouissances
corporelles, il faut les avoir éprouvé8 totalement. Mais, comme il s'agit de
pratiques rituelles, toute fantaisie se doit d'être exclue : l'acte sexuel
lui-même est alors accompli selon des règles très strictes qui visent à
manifester qu'il s'agit en fait d'une véritable ascèse qui peut conduire
l'individu jusqu'à la délivrance, en réveillant la puissance femelle qu'il porte
en lui, celle-ci étant comparable à la puissance du serpent, et en l'amenant à
s'unir à l'atman, principe mâle, qu'il porte également en lui ; de cette union
rituelle réalisée peut naître la joie parfaite, en même temps que la délivrance
définitive du cycle des réincarnations. Il va sans dire que cette deuxième voie
est jugée comme périlleuse, voire pernicieuse, pour l'ensemble des fidèles
hindous : elle ne peut être exercée que par certains privilégiés, considérés
comme des héros ou des saints, et qui ont longuement pratiqué une certaine
ascèse pour parvenir à leur condition actuelle. Selon les explications du tantrisme, l'acte
sexuel permet aux individus de se placer directement dans le cadre même des
origines de l'univers, puisqu'à ce moment-là le couple divin s'unissait pour que
naisse l'univers. En libérant sa propre énergie, l'homme participe pleinement à
l'énergie créatrice du monde. En manifestant une plus grande dévotion à la
Déesse, complément et puissance inséparable du Dieu, quel que soit le nom sous
lequel celui-ci est invoqué, le tantrisme ne pouvait échapper à la nécessité
d'introduire le domaine de la sexualité dans le cadre de la religion. Mais c'est
aussi sous l'influence de cette doctrine que s'est répandu le culte voué à la
déesse : l'hindouisme classique est resté très attaché à la dévotion à l'aspect
féminin des différentes divinités, si bien que les déesses ont fini par
supplanter, d'une certaine manière, les dieux mâles, dans le culte liturgique.
http://www.couleur-indienne.net/Amour-et-erotisme-dans-la-tradition-hindoue_a78.html Amour et érotisme dans la tradition hindoue. Aucune
civilisation n’a autant que l’Inde souligné les valeurs du corps dans son
essence, sa genèse…et par là-même autant mis en avant les vertus du désir et de
l’amour. Plus loin que les gentillettes et romantiques philosophies de l’amour
courtois propre à la civilisation européenne, l’Inde a dans sa culture toute une
philosophie de l’amour et une métaphysique de la chair. Cela se répercute dans
ses créations artistiques : sa peinture avec les miniatures suggestives des
positions du kama sutra, les fresques et sculptures des temples hindous…
Philosophie du désir et de l'amour dans la tradition indienne. Si l'on se réfère
à la tradition hindoue, chaque aspect de la vie de l'homme est définie et
agencée en fonction des époques et de leur finalité. L'homme et la femme doivent
garder en tête quatre buts à atteindre. Kâma, le désir fait partie de ces
objectifs assignés à l'homme, au même titre que Dharma, le devoir et d'Artha,
l'acquisition des biens. Ces trois objectifs sont mis au service d'une finalité
suprême la Moksha. Ces quatre « purushartâ » (buts) constituent donc la trame
directrice que les hommes et femmes doivent toujours garder à l'esprit dans la
réalisation de leurs tâches quotidiennes. Dans cette optique classique, Kâma
concerne les plaisirs et l'exploration des sens susceptibles de libérer toute la
saveur des jouissances terrestres, tout en conservant la sphère des devoirs
humains et l'acquisition des biens en toute éthique. Cependant d'autres
doctrines philosophiques tel que le Tantrisme exaltent l'amour et l'élève au
rang d'absolu. Kâma, désir essentiel d'une sensualité, voire une
sexualité-passionnée, devient alors le centre de toute une théorie et d'une
pratique initiatique qui s'ancrent dans une vision énergétique de la physiologie
du corps. Le corps doté d'une puissance créatrice et sexuelle connaît alors sa
véritable dimension cosmique. Commentaires sur la théorie tantrique de l'amour.
Un bon nombre de personnes pensent qu'une partie de la pensée Hindoue a évolué,
à la fin du premier millénaire, vers des cultes dans lesquels la sexualité a été
proposée comme voie spirituelle de Réalisation de soi. C'est la base du
Tantrisme. Selon leurs préférences propres, certains pensent que le Tantrisme
est une voie authentique et une ascèse difficile, et parfaitement honorable.
Pour d'autres cependant, le Tantrisme est une dégénérescence dans laquelle les
cultes orgiaques, la prostitution institutionnalisée par les prêtres des temples
sont les aspects les plus voyants de pratiques décadentes que l'on justifiait
par une soi-disant recherche de Libération Spirituelle. D'autres encore ont
quelques raisons de penser que le Tantrisme est une affaire sérieuse, un
enseignement difficile dont l'origine se perd dans la nuit des temps. Qu'une
poussée temporaire de Tantrisme se soit produite il y a quelques siècles ne doit
pas faire oublier que le fondement s'en trouve dans les cultes phalliques du
Lingam, même si ces cultes se sont assagis et popularisés pour les faire
accepter de tous. Il est clair qu'il y a une méconnaissance de la part des
occidentaux de cette philosophe que l'on veut trop limiter à sa dimension
sexuelle, en négligeant toute la signification et la symbolique qu'elle
sous-tend Pour mieux comprendre ce qu'est le Tantrisme, on lira avec profit des
ouvrages d'Alain Danielou, par exemple. Le culte de Kâma et la naissance de
l'amour dans le coeur de Shiva. Un culte est voué à Kâma, dieu de l'amour et des
plaisirs charnels. Cette divinité dispense des joies voluptueuses et sait
combler tous les désirs. Kâma, chef de l'Eros, fils aîné né du coeur de Brâhma,
régit le cycle des incarnations et connaît pour chacun le destin qui doit
s'accomplir. Par sa force originelle, absolument créatrice, l'érotisme est une
voie d'accès et d'excellence vers la transcendance de l'être. La tradition
raconte qu'un jour, le dieu Kâma Manmatha (de son appellation complète) "celui
qui agite l'esprit", armé d'un arc et de flèches de fleurs, décocha l'une de ses
premières flèches sur le plus puissant des ascètes, Shiva en personne. Celui-ci
méditait solitaire au sommet du mont Kaïlash et ne put évincer la puissance de
l'amour qui s'installa en lui par le biais de la flèche "traitresse". Pour Kâma
c'était une manière hardie de mettre à l'épreuve la puissance de concentration
suprême du dieu Shiva et de déjouer la maitrise implacable que ce dernier avait
conquise sur ses sens. Irrémédiablement touché par cette pupashara (flèche)
d'amour, Shiva, furieux du trouble qu'il sentait monter en lui, réduisit Kâma en
cendres par le pouvoir de son troisième oeil. Néanmoins ému et distrait par
l'irrésistible parfum de l'amour, Shiva, dompté par ce charme, consentit à
épouser la belle et ferme Pârvatî, dont l'ascèse magistrale et l'absolue
dévotion sut conquérir son coeur. "La femme que je puis accepter doit être
belle, pratiquer le yoga" -(dans le sens d'ascèse)-" et être capable de
supporter l'ardeur de mon sperme. Elle doit être une yogini quand je pratique le
yoga et une femme amoureuse quand je pratique l'amour." C'est en ces termes que
Shiva désormais aspire à l'amour. Il exprime aussi un idéal de la femme propre à
la Shakti à la philosophie tantrique hindoue. C'est pourquoi Pârvati est aussi
considérée comme la déesse de l'amour pour certains...et est le symbole même de
ce sentiment, parmi tous les attributs qu'on lui prête. De son côté Pârvatî,
exalte son amant : "Tu es le plus grand des yogin, mais par l'effet de ta piété
, tu es devenu ardent en amour." On dit que depuis lors, pendant plus de mille
ans, intensément unis l'un à l'autre, ils se livrèrent à sans interruption aux
jeux délicieux et savants de l'amour... Shiva et la Shakti ou l'union du linga
avec la yoni Lingas et yonis Lingas et yonis Dans la tradition Shivaïste,
apparaît l'indissociable union du dieu Shiva et de son énergie féminine, la
Shakti, figure de puissance que l'on trouve dans tous les ouvrages d'inspiration
shivaïste et dont le couple "sculpté" formé par le linga et la yoni constitue le
symbole. Le plus souvent sculpté dans la pierre, ou simplement érigé, le linga
ou phallus repose sur la yoniqui a la forme d'une vulve ou sexe féminin. Le
linga est toujours dressé, gonflé de création potentielle, car Shiva retient
toujours sa semence. Tel un refrain célébrant la puissance exemplaire et
phallique du dieu indissociable de sa Shakti, c'est la yoniqui met en oeuvre et
en "branle" ses propres facultés divines créatrices qui autrement resteraient
inertes et sans vie. En effet sans elle, Shiva serait "Shava" c'est à dire un
cadavre. Le linga et la yoni figurent l'union du mâle et de la femelle, du ciel
et de la terre, et par là même constituent une représentation de la totalité de
l'existence. En résumé, par l'union du linga et de la yoni, l'Absolu qui se
déploie dans le monde prouve qu'il surmonte l'antagonisme mâle-femelle ou
spirituel-matériel. Le linga représente également le cosmos, mais aussi le
pouvoir de connaître, la conscience comme axe de la réalité. Non plus orienté
vers la finalité naturelle de force de vie et d'incarnation, le phallus dressé
vers le ciel représente le rassemblement des énergies du yogi sur le plan
sensible et leur conversion vers un niveau subtil. D'emblée ce lien prodigieux
et privilégié entre l'ascétisme et l'érotisme est posé, créant une configuration
particulièrement originale et paradoxale du désir où la force spirituelle et
l'accomplissement sexuel s'exaltent mutuellement. Pour en revenir au linga
lui-même, il est une représentation religieuse tout à fait commune en Inde, sans
que le carractère sexuel soit minimisé ou occulté. Pierres, galets ou
fourmilières constituent des lieux d'élection, des lingas "spontanés". Les
lingas svayambhû ("automanifestés") sont les plus sacrés, à l'image de celui d'Amarnath,
une formation de glace naturelle. Le linga est souvent oint de lait et de ghî
(beurre fondu) ou entouré de fruits, de sucreries, de feuilles et de fleurs. On
trouve le thème de la quête entre les deux extrêmes que sont l'ascétisme et
l'érotisme, réconciliés dans beaucoup d'oeuvres artistiques de l'Inde, dans la
poésie classique et même dans la littérature indienne. Exemple d'expression de
l'érotisme dans les temples hindous, l'exemple de Khajuraho Les temples, outre
leurs fonctions sacrées de lieux où résident les divinités, jouaient, et bien
sur jouent toujours, le rôle de livres d'images. Dans nos églises d'occident,
l'iconographie peinte ou sculptée est relativement limitée : scènes de la vie de
Jésus et saints divers. Il n'en va pas de même dans les temples hindous. Une
profusion extraordinaire d'images, le plus souvent de pierre, est la règle.
Images de dieux sous leurs diverses formes, et l'on sait qu'elles sont
innombrables. Images toujours des êtres célestes compagnons des dieux, ou
ennemis (démons divers...). Illustrations en fresque des grandes épopées qui
constituent le fondement culturel de tout Indien : le Mahâbharata et le Râmâyana.
Série d'images des rois bâtisseurs et conquérants qui désiraient immortaliser
dans un matériau durable l'évocation de leurs exploits. Et puis tout un ensemble
d'images contant les scènes quotidiennes. Bien que l'on ne puisse réellement les
considérer comme l'expression d'un vécu quotidien (!!), les images érotiques des
temples veulent illustrer les réalités de la vie et elles ont donc une fonction
didactique. A la visite de temples comme ceux de Khajuraho les plus connus dans
le domaine des sculptures érotiques, on constate plusieurs faits qu'il convient
de méditer pour se faire une idée sur les sculptures érotiques en général: Les
sculptures érotiques ne représentent qu'une toute petite partie de l'ensemble
des images de pierre, environ 5 %. En ne voyant que cela, on se focalise sur un
sujet tout à fait mineur. Les touristes occidentaux sont fascinés par ces scènes
de sexe, alors que les touristes indiens les regardent comme le reste..., c'est
à dire rapidement. Un temple hindou est une construction complexe qui non
seulement suit des règles architecturales précises, mais en plus est dotée de
significations symboliques. Prenons deux exemples simples : 1. Le mandapa, ou
hall à piliers, est une salle qui, une fois franchie l'entrée extérieure,
constitue un espace intermédiaire qui précède la partie réellement sacrée du
temple (la cella ou garbha griha) où réside la divinité (on simplifie). Or, on
constate que les murs extérieurs du mandapa ne sont pas ornés de divinités.
Celles-ci se trouvent au niveau de la partie sacrée du temple, sous la tour
curviligne (la shikhara), laquelle surmonte l'espace sacré de la cella. En
l'occurrence, à Khajuraho, les divinités se trouvent sur trois registres
superposés, à plusieurs mètres au-dessus du niveau du sol. 2. Les murs
extérieurs du temple sont pourvus de frises et médaillons sculptés dans les
parties basses. Les parties basses du temple représentent le niveau humain, les
parties hautes, le niveau divin. Les frises des parties basses du temple
présentent des scènes de la vie ordinaire, quelquefois des scènes triviales.
Ainsi, les actes sexuels ont-ils une prédilection pour les postures considérées
comme "animales", par exemple l'homme debout pénétrant par l'arrière la femme
penchée en avant, voire complètement animales puisqu'il s'agit d'un acte sexuel
entre un être humain et un animal... On est tenté de voir dans ces
représentations l'aspect le plus "bas" de l'activité sexuelle humaine. A l'appui
de cette opinion que certains jugeront peut-être moraliste, on notera deux
images du temple de Lakshmana : sur l'une d'elles, citée plus haut, l'homme
pénètre la femme "bestialement". Mais à sa droite, se trouve un éléphant qui
détourne la tête pour voir la scène. L'éléphant semble sourire et dire :
"Comment ! un homme qui fait ça !". Une deuxième scène montre encore un éléphant
qui regarde avec effarement un homme doté d'une érection phénoménale... L'homme
serait-il attiré sexuellement par l'éléphant(e) ? Sur les registres
architecturaux où résident êtres célestes, nymphes gracieuses et dieux, le
spectacle n'est pas le même. Les nymphes aux formes voluptueuses ont tout pour
inspirer des désirs puissants. Leurs activités (se regarder dans un miroir, se
maquiller le sourcil, se retirer une épine du pied, faire ou défaire un vêtement
de mousseline, oh combien légère et transparente), tout acte, toute posture
évoque avec grâce leur capacité de séduction. Quelquefois, on les voit ouvrir
leur vêtement au niveau des cuisses, dévoilant leur sexe fendu bien apparent.
Elles sont aussi représentées accompagnées d'un petit singe à leurs pieds. Cet
animal symbolise la passion amoureuse aveugle. D'autres ont un scorpion gravé
sur la cuisse. Cet animal évoque également la passion sexuelle. Les dieux
qu'elles accompagnent et entraînent dans des jeux amoureux sont des êtres parés
de tous les attributs de la beauté et de la séduction. On représente ces couples
dans des postures certes sensuelles (par exemple le dieu enlace sa compagne,
nymphe ou Shakti, sa main tenant gentiment son sein, et ils se regardent
amoureusement), mais pas d'accouplement. Les accouplements souvent acrobatiques,
qu'admirent tant ces chers touristes, en regrettant de ne pouvoir les pratiquer,
sont le fait de Yogi avancés dans les voies complexes du Tantrisme. Ces postures
de Kama Sutra ne sont pas faites pour le commun des mortels. Elles sont
d'ailleurs sans intérêt particulier pour une relation sexuelle réussie (opinion
personnelle). Ces exploits mettent souvent en jeu plusieurs partenaires et des
assistantes qui trouvent manuellement leur satisfaction. Nous retiendrons que la
statuaire érotique des temples de Khajuraho peut être vue et comprise à trois
niveaux : Le niveau de la vie "ordinaire". Le sexe existe, c'est une fonction
naturelle de l'être humain; autant bien l'assumer et savoir comment. L'homme,
mené par son sexe, a souvent tendance à s'en servir de manière pas très noble,
en asservissant la femme à ses désirs, voire en se servant d'animaux. Le niveau
de la vie pas ordinaire des pratiquants du tantrisme, pour lesquels la pratique
sexuelle constitue, au contraire, une voie de libération des conditionnements de
l'être humain, pour autant qu'elle soit guidée par un enseignant qualifié (guru)
et pour des motifs non attachés à la jouissance physique. Les postures spéciales
adoptées exigent des compétences physiques hors du commun et ont des objectifs
qui dépassent largement la sexualité "normale". Le monde des dieux, êtres
quasi-immortels engagés dans l'interaction des polarités Shiva/Shakti. Nous ne
pouvons que l'imaginer. L'origine variée des scènes qui se déroulent sur les
murs de certains temples en Inde montre que les temples de Khajuraho ne
constituent pas une singularité. Cependant il est également vrai que beaucoup de
ces images érotiques ont été, au fil des siècles, saccagées d'abord par les
musulmans, hostiles à toute représentation de l'être humain, mais aussi tout
simplement par les effets du temps.
À la suite du védisme (entre
1500-1000 av. J.-C.) qui place le désir (kāma)
à l’origine de la Création, le brahmanisme développe
au contraire une « idéologie
de la rétention ».
Le tantrisme apparaît transgressif, en réaction pour restaurer le kāma en
tant que voie de libération (moksha).
La délivrance est
atteinte en intégrant le désir à la spiritualité, par la pratique de rituels et
d'exercices yogiques.
Le pratiquant (tantrika)
doit transmuter son corps pour l'intégrer aux forces de l'univers, en utilisant
le désir, énergie du monde, y compris par la
sexualisation du rituel (et non l'inverse comme le perçoivent les Occidentaux),
une démarche religieuse et spirituelle initiatique complexe et rare.